Oto Oto,
Quand l’écho d’un izakaya se perd dans le vacarme des additions salées :
On rêvait d’un véritable izakaya, ce « pub japonais » où l’on picore, on rit et on arrose la soirée d’un bon saké – du moins si l’on en croit la prose du site : « L’izakaya est au Japon ce que le pub est à l’Angleterre » restaurant Oto Oto.
À Oto Oto, l’illusion s’arrête net dès qu’on franchit la porte : la salle minuscule entasse ses convives comme des sardines en boîte, les tables se touchent plus intimement que bien des couples, et la vaisselle cheap achève de briser la promesse d’un « voyage au pays du Soleil-Levant».
Côté apéritifs, le choix tient sur un set de table froissé ; quant au saké, il tutoie sans gêne les sommets alpins : 19 € les 15 cl pour un Ura Ganzaryu “Fuka”. Une gifle tarifaire qui n’aurait de sens que si l’on sirotait du nectar d’empereur ; hélas, c’est à peine digne d’un stand de matsuri.
Le restaurant mise tout sur ses cocons-kamakura, sortes de petites « grottes » blanches vendues comme des refuges zen. Sur Instagram, l’effet est bluffant ; en chair et en os, c’est au mieux une banquette en plastique sous une demi-voûte de plâtre. Oui, l’alcôve amortit gentiment le brouhaha quand on s’y glisse, mais l’esthétique reste un gadget photogénique. Autrement dit, les kamakura d’Oto Oto ne sont qu’un trompe-l’œil marketing : parfaites pour accumuler des likes, incapables d’offrir l’émerveillement promis.
Verdict du palais :
-Kara age – 15 € la portion « XL » : Grosse semelle dégoulinante d’huile : croustillant dehors, poumon gras dedans. On cherche la subtilité de l’ail et du gingembre, on trouve la nostalgie d’un seau KFC.
Okonomiyaki – 15 € : Disque pas si « ok » que ça : pâte lourde, bonite rachitique, et surprise peu ragoûtante d’un morceau de poisson obèse embusqué sous la mayo.
Yakisoba – 14 € : Nouilles blafardes, sauce anémique : le genre de plat qu’un étudiant affamé expédie un dimanche soir, pas ce qu’on attend d’une assiette payée au prix d’un plat du jour chez Daniel & Denise.
Ramen – 16 € : Bouillon aussi pâle que la conversation d’un lundi matin, garnitures chiches. Le nirvana umami ? Parti prendre l’air.
Mochi sésame – 9 € : Enveloppe épaisse, pâte de haricot rouge triste . On soupçonne la surgélation express. Trois mini-boules de glace pour tenter de noyer le crime.
Dans une ville où l’on peut déguster pour la même somme un saucisson brioché fondant chez un Mères-Brazierien convaincu, Oto Oto se paie le luxe de facturer la fadeur. Pire : l’adresse ose le mot « cocons kamakura intimistes » dans les médias ; en réalité, c’est plutôt un terrarium trop petit pour ses propres ambitions.
Au final, l’onomatopée « Oto Oto » – littéralement boum boum en japonais – résonne comme le bruit de votre portefeuille qui s’écrase au sol. On ressort le palais déçu, le sourire absent, et l’impression d’avoir financé un ersatz de voyage que même une couche de sauce tonkatsu ne parvient pas à maquiller.
Verdict : un restaurant qui joue la carte de l’exotisme mais finit en carte postale jaunie. Pour un vrai moment izakaya, mieux vaut traverser la rue, pousser la porte du premier bouchon venu et boire un pot de Côtes-du-Rhône : au moins, on y trouve encore la chaleur et la sincérité qu’Oto Oto a oubliées en route.